
Place de la Victime dans le droit criminel canadien
"Notre Code criminel canadien laisse très peu de place pour la victime. Il ne lui reconnaît presque pas de droits et l'accable d'obligations. À la Cour, la victime est un témoin qui se sent dépassé par les évènements, comprend mal ce qui se passe et se plaint du manque d'égards à son endroit. La sentence lui accorde peu de satisfaction. L"intérêt de la victime est subordonnée à des objectifs administratifs, à des ambitions professionnelles et à la nécessité de châtier quelques coupables."
Micheline Baril, L'envers du crime, 1984, p. 320
QUE RÉCLAMENT DONC LES VICTIMES DANS LE DROIT CRIMINEL?
Qu'on prend en compte leurs besoins et leurs intérêts;
Que le système de justice soit plus humain;
Qu'on leur permet une participation et une écoute;
Qu'on les informe plus activement des étapes procédurales et des enjeux en lien avec ces étapes;
Qu'on leur accorde plus de temps;
Que les décisions reconnaissent les torts qu'elles ont subit aux mains du délinquant
LOIS DÉCLARATOIRES AU CANADA
Énoncé canadien de principes fondamentaux de justice pour les victimes (1989(
Lois encadrant l'aide et l'indemnisation dans les provinces et territories
Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels (Québec, 1988)
Charte canadienne des droits des victimes (2015)
CHARTE CANADIENNE DES DROITS DES VICTIMES (CCDV)
Elle tente, notamment d'encadrer les droits à l’information, à la protection, à la participation et au dédommagement dans une législation et de promouvoir, améliorer et renforcer ces droits. Elle contient également la possibilité pour la victime de faire une Déclaration de la Victime (DV).
DÉCLARATION DE LA VICTIME
Une des mesures visant à favoriser une plus grande participation des victimes dans le système de justice. L'utilité de la DV et son importance sont nombreuses:
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Faire comprendre leur expérience/exprimer leurs craintes
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Donner une voix/ sortir de l’anonymat
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Avoir un impact sur les décisions (sentence, mise en liberté)
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Redonner un plus grand contrôle et alléger le sentiment d’être tenues à l’écart dans le processus judiciaire
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Devoir de mémoire pour les proches des victimes
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Perçoivent les procédures plus équitables malgré les décisions qui sont prises
LES LIMITES DE LA DÉCLARATION DE LA VICTIME
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Doit favoriser la détermination d’une peine juste à la lumière des objectifs et principes de la détermination de la peine énoncés dans le Code criminel (Arrêt Berner, 2013)
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Ne doit pas contenir de matériel qui: ✓ distrait le tribunal des éléments dont il doit tenir compte dans la détermination de la peine ✓ semble accorder plus d’importance à la vie de la victime qu’à celle du délinquant ✓ cherche à compenser le chagrin de la ou des victimes par l’imposition d’une peine sévère
PORTÉE ET LIMITE DES DROITS ENCADRÉS DANS LA CCDV
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Méconnaissance de la CCDV
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Droits qui sont peu définis
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Droits dont l’application relève de différentes instances
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Droits qui sont balisés par plusieurs lois
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Droits qui ont une portée limitée
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Discrétionnaires
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Recours limités
INTERPRÉTATION DE LA CHARTE CANADIENNE DES DROITS DES VICTIMES (art.27)
Art. 27: La présente loi doit être interprétée et appliquée de manière raisonnable dans les circonstances et qui n’est pas susceptible de nuire à la bonne administration de la justice et de porter atteinte au pouvoir discrétionnaire :
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de la police ou du poursuivant (compromettre toute enquête relative à une infraction, nuire ou causer des délais excessifs)
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d’un ministère
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de toute personne ou tout organisme autorisé à libérer le délinquant dans la collectivité de mettre en danger la vie ou la sécurité d’une personne
ABSENCE DE DROIT D’ACTION (art.28-29)
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La violation ou la négation d’un droit prévu dans la CCDV ne donne pas ouverture à un droit d’action ni au droit d’être dédommagé.
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Aucun appel d’une décision ou d’une ordonnance ne peut être interjeté au seul motif qu’un droit prévu par la présente loi a été violé ou nié.
« C’est une chose de proclamer que les victimes d’actes criminels bénéficieront de toute une gamme de droits. Une telle déclaration a son importance, j’en conviens. Mais c’est tout autre chose de prévoir des façons concrètes de tenir ces promesses, ce qui suppose d’allouer des ressources humaines et financières suffisantes et de mettre en place une structure de recours efficace. »
L’Honorable Irvin Cotler, lors du dépôt du projet de loi C-32, avril 2014